Nos vœux pour 2016 !

Loi-Droit-LarrièreAu soleil levant d’une année nouvelle, Janvier est la saison des vœux et des résolutions. Bons vœux que l’on adresse aux autres. Résolutions que l’on prend pour soi. Généreuses intentions sincèrement exprimées pour soi-même et nous autres ; que les uns et les autres rayonnent, perdurent nous apportent bonne fortune et nous accompagnent en pensées et en actes, l’année à venir durant. Je vois déjà poindre l’étonnement du lecteur habitué aux posts de la Loi des Parties. Il est dubitatif. Celui qui n’aura pas encore zappé (faisant croître, au passage, pour son référencement, un taux de rebond trop faible pour le si jeune blog qu’est La Loi des Parties !) se demande encore une fois où est-ce que l’on veut bien l’emmener ou le perdre. Le lecteur qui a (nombreux le sont parmi ceux de La Loi des Parties) encore son latin, se demande s’il ne l’a pas, une bonne fois pour toute, perdu au fond de  la classe… Qu’ils se rassurent ! Il ne sera question que de vœux ! Janvier oblige ! Non par le droit, non par la loi, non par décret, mais par politesse, par bienséance. Politesse et Bienséance, deux règles non écrites qui pourtant nous obligent et dans lesquels se niche l’intimité de nos vœux. Deux règles, qui comme une révérence, au-delà du droit, font appel de la décision d’autres vœux ou justifie qu’on « appelle de nos vœux ».

Malgré les SMS et autres messages de 140 caractères, ce temps des vœux passe encore pour un des seuls moments privilégiés où une carte, un billet ou une lettre tout juste décachetée révèle une écriture. Manuscrite, elle dévoile un peu de la personnalité de son auteur ou en tout cas, plus que ce dernier n’en dit sur son profil LinkedIn, Viadeo, Facebook ou Amplement. Charme suranné de la plume qui, délicatement cisèle le papier en s’attardant sur un mot plus profondément éprouvé. Esquisse d’une pensée hésitante qui se noie dans une encre qui s’estompe. Sincérité d’un propos qui se marque dans l’épaisseur d’un trait.

Au-delà du message brut qu’ils délivrent, les vœux manuscrits ainsi exprimés dévoilent une réalité : ils disent plus que ce qu’ils signifient. Alain pourtant nous disait déjà, à l’aube de l’année 1926, dans un de ses célèbres Propos consacré aux « Vœux » que « tous ces souhaits et tous ces vœux, floraison de janvier ne sont que des signes. » Le philosophe s’attarde sur leur importance : « les hommes ont vécu pendant des siècles d’après des signes comme si tout l’univers, par les nuages, la foudre et les oiseaux leur souhaitait bonne chasse ou mauvais voyage. […] Nous sommes à peu près guéris de nous demander si l’univers a une opinion et laquelle. Mais nous ne serons jamais guéris de nous demander si nos semblables ont une opinion et laquelle. Nous n’en serons jamais guéris, parce que cette opinion dès qu’elle est signifiée, change profondément la nôtre » (Alain, Propos, tome I, Gallimard, Pléiade p. 693).  Ces vœux, nos vœux sont donc plus que le message qu’ils délivrent : ils nous rassurent sur l’attention qu’éprouve notre prochain et nous confortent dans notre sociabilité ; ils conjurent le sort d’incertitudes à venir ; ils résonnent comme une promesse d’opportunité… celle de se revoir, de se recroiser d’échanger ou de débattre à l’occasion d’une de ces 365 prochaines journées à venir. Une manière de dire, sans pour autant l’écrire de manière expresse, « oui, vous comptez pour moi, vous comptez gratuitement, pour votre avis, en tant que personne !».

A l’heure du tout réseau et de l’« expérience client » virtualisée, les cartes numériques (fussent-elles animées !), et autres vœux exprimés par vidéo, par courriel ou sur un blog (sic !) ne sont pas emprunts de la même émotion. Cette dernière s’est estompée car assisté de la mécanique et de l’électronique, l’effort personnel dans l’exercice des vœux, semble moindre. Le message des vœux est noyé parmi une profusion d’autres messages dans l’océan des données…. Il pourrait alors apparaître comme une bouteille à la mer… sauf que cette bouteille trouve son destinataire. Alain, se penchant sur la réception des vœux, souligne :

« dans le temps où chacun regarde cet avenir sur carton, que le facteur nous apporte, il est très mauvais que ces semaines et ces mois, que nous ne pouvons connaître tels qu’ils seront, soient teints d’humeur chagrine. Bonne règle donc qui veut que chacun soit bon prophète ce jour-là, que chacun élève les couleurs de l’amitié

(Alain, Propos, tome I, Gallimard, Pléiade p. 694).

Laissez donc, avec Alain, La Loi des Parties être bon prophète… et vous souhaiter une excellente année 2016, riche de contrats bien négociés et pleine de droits intelligiblement réformés.

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