Guide du délit de marchandage et délit de prêt illicite de main d’oeuvre

Stéphane Larrière-Délit MarchandageLe délit de marchandage et délit de prêt illicite de main d’œuvre doivent être des points de vigilance, dans la rédaction des contrats et dans leur exécution. La publicité autour de la récente actualité judiciaire des chantiers de l’EPR de Flamanville (Bouygues condamné à 25 000 euros d’amende pour travail dissimulé, les Echos, 7 juillet 2015) vient encore une fois de le rappeler. Le rapport annuel de l’Inspection du travail à l’intention du Bureau international du travail pour 2013 fait état de 1850 infractions constatées sur le territoire. Elles représentent près 6% des 30 788 infractions constatées en matière de travail illégal, presque autant que l’emploi d’étrangers sans titre de travail (L’inspection du travail en France, bilans et rapport, Ministère du Travail de l’Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue Social, novembre 2014, p.129).

Ces deux délits pénaux posés par le Code du travail sont des exemples de la tendance extensive du droit du travail à s’inviter dans la pratique contractuelle. Elle vient s’imposer à la loi des parties pour, au-delà du contrat, protéger la relation de travail salarié. Dès lors, l’insertion de certaines clauses devenues de style dans les contrats n’est plus suffisante à protéger les acteurs économiques contre la constatation de l’infraction. Elle l’est d’autant moins si lesdites clauses sont rattrapées ou pire, contredites, par la réalité opérationnelle… Les faits reprennent leurs droits pour ainsi dire…Et voilà qui peut coûter cher, très cher même, car la cascade de sanctions pénales et civiles peut être lourde de conséquences, voire fatale pour les auteurs et l’exercice de leur activité :

• amende de 30 000 euros et/ou peine de prison de deux ans pour la personne physique (Code du travail, art. L8234-1 et L8243-1) ; en outre, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 € d’amende lorsque l’infraction est commise à l’égard de plusieurs personnes ou lorsque l’infraction est commise à l’égard d’une personne dont la vulnérabilité ou l’état de dépendance sont apparents ou connus de l’auteur et à dix ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende lorsque l’infraction est commise en bande organisée.

amende de 150 000 euros pour l’entité et possible dissolution de l’entreprise, interdiction d’exercer l’activité concernée (Code pénal art.131-39),  interdiction d’exercer l’activité de sous-entrepreneur pendant une durée de 2 à 10 ans, affichage ou publication de la décision judiciaire (Code du travail, art. L8241-1 et L8243-1) ;

• possible action en dommages et intérêts exercée par des salariés ou par une organisation syndicale (sans qu’elle ait eu besoin d’en recevoir le mandat des salariés lésés) pour réparation du préjudice subi, une requalification de la relation en contrat de travail (Code du travail, art. L8232-3) avec l’application des régimes associés (charges sociales etc.) ; nullité absolue du contrat de sous-traitance ou de prestation service ;

• paiement solidaire des impôts, taxes, cotisations et autres rémunérations pour le bénéficiaire qui a connaissance de la situation irrégulière.

Ces sanctions sont à considérer avec d’autant plus d’attention que la tendance générale, marquée par les jugements des procédures initiées en 2008 et 2009 (et donc jugées en 2013 !!), confirme un taux de condamnation à hauteur de 90% des cas, dont 70% se limitent à des amendes. Toutefois, un cas sur sept donne lieu à une peine d’emprisonnement (L’inspection du travail en France, bilans et rapport, Ministère du Travail de l’Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue Social, novembre 2014, p.149).

Bref, même s’il s’agit d’apprécier concrètement les risques en fonction de chaque situation particulière, les délits de marchandage et de prêt illicite de main d’œuvre doivent être appréhendés avec sérieux, quelles que soient les stipulations contractuelles.En effet, tous les métiers impliquant, en contrepartie d’une rémunération, la fourniture d’une prestation de service ou une sous-traitance qui repose sur une intervention de personnel, peuvent tomber sous le coup des délits de prêt illicite de main d’œuvre et de marchandage. Il peut s’agir de prestations intellectuelles, d’activités de conseil, de communication, de publicité, de bureau d’études ou de services informatiques. Il peut aussi s’agir de prestations manuelles, telles que la maintenance, le nettoyage, le gardiennage ou la sécurité.

Au-delà du risque de condamnation, la lenteur des procédures (5 ans en moyenne), le stress qu’elles génèrent, et l’atteinte à l’image qui en découle, devraient inviter les acteurs économiques à la prudence. En effet, la reconnaissance d’une coresponsabilité pénale entre le client et son fournisseur dans la commission de ces délits est certainement de nature à rompre la confiance entre ces deux parties. C’est même sans doute un cas pouvant conduire à une véritable rupture de la relation, malgré le souhait des parties (voir « la négociation du contrat en questions« ).

Cette vigilance est d’autant plus importante qu’en matière de délit de marchandage et de prêt de main d’œuvre illicite, rien n’est jamais définitivement acquis. Il s’agit, dans la majorité des cas, de délits qui s’insinuent dans des situations qui ne sont pas forcément litigieuses au départ. Nichée dans un contrat de prestation de service ou de sous-traitance, une situation non-conforme au droit peut, au fil du temps, venir s’installer, se poursuivre et ainsi devenir délictueuse : « à l’insu de son plein gré » pourrait-on dire….

Délit de prêt illicite de main d’œuvre : que dit la loi ?

Le Code du travail édicte une règle simple : la location simple de main d’œuvre est interdite en dehors du travail temporaire. Le délit de prêt de main d’œuvre illicite et le délit de marchandage viennent protéger cette règle.

Dès lors, « toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d’œuvre est interdite. Toutefois, ces dispositions ne s’appliquent pas aux opérations réalisées dans le cadre des dispositions du présent code relatives au travail temporaire, aux entreprises de travail à temps partagé […]» (Code travail, art. L8241-1).

Le délit de prêt illicite de main d’œuvre vise notamment à protéger le monopole des sociétés d’intérim qui ont un statut particulier (autorisation ministérielle, caution etc.). En dehors des dérogations légales (travail temporaire, portage, entreprises de travail à temps partagé etc.), toute opération lucrative de prêt de main-d’œuvre à titre exclusif est donc interdite. Ainsi, le délit est constitué, si :

  • l’opération consiste seulement, en elle-même, en une mise à disposition de personnel ;

et cumulativement

  • l’opération présente un caractère lucratif, c’est-à-dire une contrepartie rémunérée.

Selon le Code du travail également, « le marchandage, défini comme toute opération à but lucratif de fourniture de main-d’œuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne ou d’éluder l’application de dispositions légales ou de stipulations d’une convention ou d’un accord collectif de travail, est interdit » (Code travail, art. L8231-1).

Cette interdiction posée par le droit du travail, vise une protection de la relation salariée. Elle est instaurée au bénéfice du salarié lui-même, et plus généralement protectrice de la société. Le délit est donc constitué, si cumulativement :

  • l’opération consiste en une mise à disposition de personnel ;
  • l’opération présente un caractère lucratif, c’est-à-dire qu’elle est rémunérée ;
  • l’opération crée un fait dommageable, constitutif d’un préjudice  pour le salarié mis à disposition, ou pour la collectivité par le contournement des textes applicables du droit du travail. Dans ce dernier cas, il n’est cependant pas nécessaire de prouver le préjudice.

Ainsi, la mise à disposition contre rémunération, de personnel est interdite, si elle cause, au salarié concerné, un préjudice ou, si elle permet de contourner le droit du travail.

Quoique très proches, les deux délits de prêts de main d’œuvre illicite et de marchandage reposent sur des incriminations différentes. Elles empêchent l’application de la règle « non ibis in idem » selon laquelle un même fait ne peut être reproché deux fois. Ils peuvent donc se conjuguer ou se cumuler.

Délit de prêt de main d’œuvre illicite et de marchandage : qu’est-ce qui est autorisé ?

En vertu de la loi, l’activité de prêt de main d’œuvre qui n’est pas réalisée à titre exclusif, mais à l’occasion d’une prestation ou d’une sous-traitance, est licite. Elles se distinguent de l’intérim par la finalité de l’opération. L’intérim vise à pallier un manque de personnel. La prestation de service ou la sous-traitance correspond à une tâche objectivement définie, dans laquelle la main d’œuvre n’est qu’un moyen, et qui vise à obtenir une certaine valeur ajoutée, un résultat que l’entreprise utilisatrice n’aurait pas obtenu de son personnel par manque d’expertise. Si dans le cas de l’intérim, l’entreprise utilisatrice « achète » la force de travail qu’elle va, elle-même, orientée et faire fructifier ; dans la prestation de service ou la sous-traitance, elle « achète » le fruit du travail développé en toute indépendance par un tiers ; résultat auquel elle serait en outre bien incapable d’aboutir par sa connaissance, son organisation, bref par elle-même. Est ainsi recherchée au travers de la prestation de service ou de la sous-traitance, l’exigence d’un savoir-faire particulier, d’une expertise ou la mise en œuvre d’une compétence technique spécifique que l’entreprise utilisatrice (le client) n’a pas en interne. Sous réserve de ne pas mettre le salarié dans une situation préjudiciable, le prêt de main d’œuvre est alors possible quand il n’est qu’une partie des moyens mis en œuvre, un accessoire, dans cet ensemble plus complexe que constitue la prestation ou la sous-traitance.

On le pressent, la frontière entre le prêt de main d’œuvre exclusif interdit et le prêt de main d’œuvre autorisé à l’occasion d’une prestation de service, est ténue. Encore faut-il être capable de démontrer le caractère non exclusif et l’absence de préjudice pour les salariés concernés. Or, toute la difficulté réside dans le fait que même si l’intention de départ des parties n’est pas forcément celle-ci, au fur et à mesure du temps peut se créer une situation de prêt de main d’œuvre illicite qui en sus, pourrait s’avérer préjudiciable aux salariés impliqués.

Échapper au délit de prêt de main d’œuvre illicite et de marchandage : comment faire ?

Le meilleur moyen de ne pas tomber sous le coup du délit de prêt illicite de main d’œuvre et de marchandage consiste à se garder de toute similitude entre l’opération de mise à disposition et les conditions de travail salarié dans l’entreprise utilisatrice. Les conditions de travail du salarié mis à disposition pour l’opération, ne doivent pas, dans la mesure du possible, s’apparenter ou être assimilées à celles d’une relation directe de travail salarié avec le client utilisateur : le salarié du prestataire ou du sous-traitant doit avoir un traitement différent des salariés de l’entreprise utilisatrice. Il n’est pas recruté via un CV, ne doit pas porter de badges identiques aux employés, ni avoir accès aux subventions de la cantine, par exemple.

Le lien de subordination et le pouvoir de direction et de contrôle doivent, pour éviter toute qualification du délit de prêt de main d’œuvre illicite et du délit de marchandage, rester au prestataire employeur. En aucun cas, ils ne doivent être exercés par l’entreprise utilisatrice. Ainsi si l’entreprise sous-traitante conserve l’autorité sur son personnel et exerce un contrôle sur la réalisation de la prestation par la présence de cadres sur le lieu d’exécution de la prestation, le délit de prêt illicite de main d’œuvre ne sera pas constitué.

Pourtant, bien appréhendé au démarrage de la prestation ou de la sous-traitance, il ne faudra pas laisser s’installer un faisceau de présomptions caractérisant une opération de prêt de main d’œuvre illicite, déguisée sous une fausse prestation de service ou une fausse sous-traitance. Se fondant sur les procès-verbaux les pièces collectées (devis, bons de commande, factures, contrats, document commerciaux) par les inspecteurs du travail, les juges vont apprécier la constitution du délit de prêt de main d’œuvre illicite et de marchandage, par un jeu d’indices concordant.

Le rapprochement des faits constatés sur le terrain viendront renforcer ou affaiblir la possible constitution du délit de prêt illicite de main d’œuvre et de marchandage. Les juges tenteront de détecter dans les indices, l’existence du contrat de travail qui se définit par trois éléments : une prestation de travail, une rémunération versée en contrepartie du travail fourni et un rapport de subordination juridique. Dans ce cadre, l’employeur est en outre tenu à certaines obligations corrélées à son autorité et son contrôle que sont  l’organisation et la fourniture du travail, les moyens nécessaires à son exécution et le cadre social dans lequel il s’inscrit (durée du temps de travail etc.).

Afin de faciliter la compréhension, nous avons classé ces indices en fonction de leur impact sur les critères et les obligations qui permettent de qualifier la relation de contrat de travail. Ils n’ont pas besoin d’être tous présents pour conclure à la qualification de délit de prêt illicite de main d’œuvre ou de marchandage, mais la conjonction de certains d’entre eux viendra en accréditer la constitution.

  • indices dans le contexte et dans l’organisation de la prestation

⇒la prestation n’est pas précisément définie au départ mais se détermine au fur et à mesure au fil des jours

⇒ la prestation est dans le cœur de métier de l’entreprise utilisatrice ;

⇒ la prestation effectivement réalisée va au-delà de ce qui a été prévu dans le cadre du contrat ;

⇒ la sélection des salariés mis à disposition ;

⇒ les salariés prêtés exécutent des tâches similaires à celle des employés de l’entreprise utilisatrice ;

⇒ les salariés mis à disposition ne sont pas formés et ne présentent aucune compétence témoignant d’un savoir-faire spécifique ;

⇒ la longue durée de la prestation ;

  • indices dans de la rémunération versée par l’entreprise utilisatrice à l’entreprise prestataire

⇒ la rémunération au temps passé du salarié prêté ;

⇒ la prise en charge des frais de vie par l’entreprise utilisatrice ;

  • indices dans de le rapport de subordination passé du prestataire à l’entreprise utilisatrice

⇒L’absence ou la faible fréquence des contacts du salarié prêté avec l’entreprise prestataire ;

⇒ l’absence de manager et de contrôle par l’entreprise prestataire du travail réalisé par le salarié prêté ;

⇒ l’organisation et le contrôle par l’entreprise utilisatrice du travail réalisé par le salarié prêté ;

⇒ la gestion par l’entreprise utilisatrice du personnel prêté en termes de congés, de formations ;

  • indices dans les moyens mis à disposition par l’entreprise utilisatrice :

⇒ l’entreprise utilisatrice accueille dans ses locaux les salariés prêtés sans espace distinctif dédié par rapport à ses propres salariés ;

⇒ l’entreprise utilisatrice fournit les véhicules nécessaires à l’exécution de la prestation par le salarié mis à disposition ;

⇒ l’entreprise utilisatrice fournit les moyens de communication (téléphones, mobiles) et les ordinateurs équipés des logiciels nécessaires à l’exécution de la prestation par le salarié mis à disposition ;

  • indices dans l’intégration aux équipes et au cadre social :

⇒ les salariés prêtés ne sont pas identifiés comme prestataires prêtés : présence dans l’annuaire, interconnexion avec les salariés de l’utilisateur

⇒ les salariés prêtés se présentent comme membre du personnel de l’utilisatrice dans les relations d’affaires

⇒ les salariés prêtés signent sous le logo de l’entreprise utilisatrice ou passent des commandes ou des ordres au nom de l’entreprise utilisatrice ;

⇒ les salariés prêtés s’inscrivent dans le cadre social de l’entreprise : horaires, tâches, accès à la cantine subventionnée, congés alignés sur ceux de l’entreprise utilisatrice (fermeture des établissements sans que l’exécution de la prestation ne soit poursuivie en toute indépendance)

Et le contrat…. ? Que doit-il prévoir pour empêcher le délit de prêt illicite de main d’œuvre et de marchandage ?

Ainsi que nous l’avons vu, le contrat à lui seul ne suffit pas à exonérer les parties d’un délit de prêt illicite de main d’œuvre ou de marchandage. Seule l’épreuve des faits révélera la réalité de la situation et la qualification ou non du délit. Cependant, l’analyse de stipulations contractuelles bien rédigées pourra avantageusement venir appuyer une argumentation en défense. Le contrat ne sera toutefois que de peu d’effets s’il s’agit de déguiser une situation illicite. Voici donc les quelques éléments utiles à l’établissement du contrat, assortis de conseils de rédaction.

Tout d’abord, il convient de définir avec précision la prestation qui devra être exécutée. Pour ce faire, un cahier des charges détaillé devra faire état des besoins du client qui devront être traduits en termes techniques. Il sera utilement annexé au contrat et relayé dans le préambule du contrat qui ne manquera pas de rappeler les motivations et les attentes (forcément fortes !) du client.

L’objet du contrat devra lui aussi être rédigé en précisant la nature de la prestation et insister sur ce que le prestataire s’engage à réaliser, notamment en termes de délais et de livrables. Il s’agit ici d’introduire de l’engagement et de la prévisibilité dans l’exécution de la prestation. Le prestataire doit clairement s’engager sur la tâche à accomplir et assumer la responsabilité en cas d’échec ou d’inexécution partielle.

La clause d’objet sera avantageusement complétée par une clause précisant les modalités d’exécution de la prestation. On expliquera que « le prestataire décide des méthodes, des outils et des moyens nécessaires à la réalisation des prestations, dans le respect des éventuelles contraintes techniques précisées dans le cahier des charges ». Il sera explicité aussi les moyens mis en place par le prestataire, les plannings de réalisation, la manière dont sera organisée la réalisation de la prestation, les critères de son approbation définitive par le client. En matière de prix, il est judicieux de remplacer les taux horaires journaliers par des unités d’œuvre incluant les coûts de main d’œuvre parmi les autres frais.

Une clause de gestion du personnel par le prestataire devrait compléter les modalités d’exécution. Relevant plus de l’intention,  et même s’il s’agit d’une évidence, il conviendra de préciser, pour des raisons pédagogiques plus que juridiques, que le prestataire demeurera responsable des actes de son personnel.  On pourra alors spécifier que : « Les personnes affectées à l’exécution des Prestations restent sous l’entière subordination du Prestataire qui assure leur encadrement et leur surveillance. En conséquence, les personnes affectées à l’exécution des prestations restent sous l’entière responsabilité du prestataire et ne peuvent en aucun cas être considérées comme des salariés du client. En conséquence, ledit personnel continuera de dépendre des statuts, conventions collectives et méthodes de gestion de son employeur. Il ne pourra en aucune manière être considéré comme personnel de l’autre Partie ».

Les clauses de stabilité des équipes par lequel le prestataire s’engage à faire ses meilleurs efforts pour maintenir les personnes prêtées sur la mission, semblent acceptables. Cependant, elles paraissent affecter quelque peu l’appréciation en toute indépendance par le prestataire des moyens qu’il doit mettre en œuvre pour la réalisation de sa prestation. Elles pourraient être de nature à faire peser un doute en présence d’indices suspects …. L’appréciation de la stabilité ne doit jamais être laissée à l’entreprise utilisatrice ni être assortie d’une possibilité de casser de ce fait le contrat. Il est préférable de tenter de négocier une clause de maintien des compétences qui sera moins rattachée à la qualité des personnes prêtées, d’autant plus que le prestataire restera le mieux placé pour les apprécier.

Enfin, deux clauses au contrat paraissent clés dans la disqualification du délit de prêt illicite de main d’œuvre. Il s’agit des clauses sanctionnant les manquements à la réalisation de la prestation, soit les pénalités et la responsabilité contractuelle. N’en déplaisent aux prestataires toujours soucieux de ménager leurs marges et leur responsabilité, mais il semble que le fait d’être prêt à assumer dans le cadre du contrat, des pénalités ou une responsabilité contractuelle pour manquement dans la réalisation de la prestation, est de nature à démontrer que l’objet du contrat réside plus dans l’engagement pris d’exécuter la prestation que dans les seuls moyens de son exécution. Des pénalités et une responsabilité contractuelle assumées devraient plaider en faveur d’une disqualification du prêt illicite de main d’œuvre.

Pour finir, le contrat devra s’attacher à bien encadrer et de contrôler le recours à la sous-traitance par le prestataire. Il s’agit d’éviter les mauvaises surprises qui peuvent apparaître dans une chaîne de sous-traitance mal maîtrisée: des employés de prestataires en bout de chaîne pourraient voir un préjudice dans le fait qu’ils sont moins bien traités que les salariés de l’utilisateur final et du fin fond de la relation et demander une condamnation et des dommages et intérêts pour délit de marchandage.

8 Comments

  • Christophe COUPEZ

    15 juillet 2015 at 12 h 39 min Répondre

    Très bon éclaircissement sur un sujet complexe à gérer dans les équipes informatiques.

  • David BREUIL

    9 septembre 2015 at 17 h 43 min Répondre

    Génial…. Je suis bien dans le cas d’un délit de marchandage….
    Embauché pour être placé directement chez le client… Avec une sélection par QCM…. du client.
    Formé par le client, dans le même bureau que les salariés du client, avec le matériel du client. Me faisant passé pour un salarié du client auprès de son client, je signe mes courriels avec le logo du client, j’apparais sur le planning des salariés du client, la pose de congé est validée par le client, le planning est validé par le client, les directives et le contrôle sont fait par le client…….
    J’arrête là, sur tout les points notés, ma situation correspond exactement au délit de marchandage.

  • Patrick DEDE

    16 septembre 2015 at 12 h 39 min Répondre

    Article très intéressant et très instructif.

    Merci

  • ANONYME

    30 novembre 2015 at 11 h 25 min Répondre

    Bonjour,

    Super article.
    Etant moi même concerné à 300% qu’elle est la meilleur façon de faire valoir ses droits ?
    Le signaler à la SSII ? le signaler au client ? à l’inspection du travail ? prendre un avocat ?

    Dans quel ordre est-il recommandé de faire les choses.

  • Laurent Martin

    14 janvier 2017 at 12 h 51 min Répondre

    Bonjour,

    Le prêt de main-d’œuvre illicite est d’ailleurs puni pénalement de 2 ans d’emprisonnement et de 30.000 euros d’amende pour les personnes physiques et de 150.000 euros pour les personnes morales.

  • Abdalah BEN

    26 mars 2017 at 22 h 11 min Répondre

    Bonjour,

    Je suis exactement dans ce cas comme la plupart des informaticiens en SSII (en régie).
    Comment faire valoir vos droits?
    Votre SSII sait déjà qu’elle est dans l’illégalité et elle sait que la plupart des informaticiens (qui sont en général introvertis) vont se laisser faire.
    Dans le milieu c’est un secret de polichinelle.

    Quelle est votre solution pour faire cesser ces pratiques ?
    Faire la démarche de quitter votre SSII pour un éditeur de logiciels, client final ou autre SSII qui travaille au forfait uniquement.
    Je vous rappelle qu’ils bafouent nos droits, c’est un manque de respect inacceptable.

    Pour ceux qui souhaitent poursuivre leur SSII, il y a les prud’hommes c’est long mais ça vaut le coup de se battre pour obtenir réparation du préjudice subi et surtout de faire cesser ces pratiques inadmissibles.
    Les SSII ont beaucoup à perdre dans ce type de procédures et tenteront plutôt de trouver un accord à l’amiable.

    Voici les actions à réaliser pour sortir de cette situation:
    1-mettez vous à la recherche d’un vrai poste
    2-faites le minimum de ce que souhaite le client
    3-prenez du temps pour vous former, vous mettre à niveau sur les technos que vous aimez
    4-une fois votre nouvelle entreprise trouvée, négociez votre départ, s’ils ne veulent pas négocier vous avez toujours la prise d’acte qui vous libère de suite de votre CDI.

  • LE ROY

    26 septembre 2017 at 14 h 11 min Répondre

    C’est moi

  • DELIVEYNE

    19 octobre 2017 at 16 h 31 min Répondre

    Merci Stéphane pour votre article très intéressant et utile.

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